Nous rencontrons aujourd’hui Philippe Mercier, fondateur de CoprO2.

Copro2, propose une offre tournée vers l’efficacité énergétique, notamment vers le suivi des systèmes de chauffage et d’eau chaude et l’accompagnement dans la rénovation énergétique.

Copro2 fait partie des nouveaux intervenants sur le marché, à la croisée des syndics et des prestataires classiques comme les bureaux d’études thermiques et les chauffagistes. L’entreprise a pour but d’apporter un peu d’huile dans les rouages de la copropriété.

Cet article fait partie d’une série d’interview consacrée aux prestataires de la rénovation, voir la note en fin d’article.

Philippe mercier a plusieurs dizaines d’années d’expérience dans la maintenance de système industriel et les chauffages d’immeuble.

Il nous fait part de son constat au quotidien et nous donne des pistes pour les copropriétaires qui souhaitent améliorer la gestion du chauffage dans leur copropriété.
Ce constat et les nouvelles lois grenelle l’ont amené à lancer une offre spécialement conçue pour les copropriétés.

Vous avez assuré des responsabilités de maintenance dans l’industrie. Quelles sont les différences avec une copropriété?

PM : Dans l’industrie, la réduction des coûts de maintenance et l’amélioration des rendements sont des préoccupations permanentes les contraintes sont nombreuses par exemple ce n’est pas la même personne qui assure la maintenance d’une machine en fonction du type de maintenance. C’est ce qu’on appelle la gamme de maintenance. Dans l’automobile on a une démarche de la maintenance uniquement basée sur le coût.  Si la pièce à entretenir coûte plus cher à entretenir qu’à changer on attendra qu’elle casse plutôt que de l’entretenir. C’est un calcul global qui tient compte du coût de remplacement de la pièce, du coût d’achat du coût de stockage de la pièce en attendant sa casse.

[NDLR : Ce raisonnement peut paraitre choquant, mais n’appliquons nous pas la même démarche avec nos propre objets du quotidiens : cafetière, téléphone, TV?]

Des méthodologies rigoureuses sont appliquées, elles impliquent l’ensemble des intervenants : utilisateurs, opérateurs de production, personnels de maintenance…C’est cette approche que nous appliquons en copropriété.

Les objectifs du Grenelle sont ambitieux : réduire de 38 % les dépenses énergétiques. Mais comme la plupart des copropriétés ne pourront pas investir de si tôt dans une rénovation énergétique complète, nous proposons de commencer d’abord par s’attaquer aux nombreux gaspillages que l’on constate encore trop souvent en copropriété.

Certaines mesures n’engendreront que 1 à 2 % de gains. C’est difficilement mesurable et c’est le fruit d’un travail lent et laborieux qui, comme en industrie, doit être mené avec l’ensemble des intervenants. Nous impliquons donc dans management énergétique l’ensemble des intervenants de la copropriété : prestataires, copropriétaires, locataires, syndic, BE et fournisseur d’énergies.

Ainsi, pas à pas, nous obtenons des résultats significatifs qui motivent les copropriétaires à aller plus loin et à investir dans des travaux de rénovation énergétiques plus lourds.

 Un chauffagiste pour contrôler un chauffagiste. C’est l’idéal?

Vous êtes régulièrement appelé par des copropriétés pour évaluer un prestataire, mais votre constat est mesuré sur la responsabilité des chauffagistes…

PM :  En effet, on fait le procès de ces gens là. C’est vrai qu’il y a des profiteurs, des gens qui surfacturent et des gens qui ne sont pas compétents.  Mais quand un prestataire veut aller de l’avant pour améliorer l’existant, il se heurte à un refus systématique selon moi pour plusieurs raisons qui sont souvent les mêmes :

  •  L e trio Conseil syndical/syndic/prestataire communique mal.
  • Il peut y avoir un manque de compétence technique de la part du syndic et des membres du Conseil Syndical
  • Le chauffagiste n’a pas toujours le temps matériel ou même l’opportunité d’argumenter un devis qu’il aurait établi dans le but de faire des économies d’énergie, il lui  faudrait former le syndic et le Conseil Syndical pour qu’ils comprennent la pertinence de travaux ou de modification et de sa vision à long terme alors on reste dans des décisions à courte vue.
  • Bien souvent, le chauffagiste a fait le constat d’une défaillance technique, mais l’information n’est pas remontée aux copropriétaire, ou alors elle n’est pas comprise. Conclusion :  il ne se passe rien jusqu’à l’incident qui va entrainer une réparation forcément plus coûteuse parce que non planifiée, (parce qu’elle tombe un week-end, que les pièces ne sont pas disponibles, etc. etc…
  • Par ailleurs le syndic facture son temps de manière uniforme. Ainsi, un petit problème d’incivilité entre voisins sera traité au même tarif qu’un problème technique de chauffage. Cela ne l’engage pas à passer du temps sur les vrais problèmes.
  •  Lors des assemblées générales annuelles, on peut parfois passer plus de temps à débattre de la couleur de la peinture du hall d’entrée que sur des travaux d’économies d’énergie qui sont pourtant plus importants mais moins visibles immédiatement.

La situation n’est donc pas toujours due à la responsabilité du prestataire. Ainsi en prenant des arbitrages dans certains cas nous simplifions le travail du chauffagiste. J’insiste sur ce point pour rebondir sur votre question sur le contrôle du chauffagiste. Nous sommes effectivement perçu comme cela au départ mais ce n’est pas notre unique rôle car les objectifs d’économies ne seront atteints que grâce à un véritable travail d’équipe.

Les bailleurs sociaux et les institutionnels qui gèrent de gros parcs ont, en interne, des responsables techniques qui dialoguent avec les prestataires : les décisions sont prises plus rapidement et plus efficacement. C’est beaucoup plus simple pour tout le monde.

C’est ce service que nous apportons à la copropriété : le rôle de direction technique de la copropriété que le syndic n’a ni le temps ni les compétences techniques pour le faire.

Cela porte ses fruits : l’ARC a par exemple observé dans le parc public des prix inférieurs au parc privé pour les mêmes prestations.

 En fait, les copropriétés n’ont pas de visibilité et pas de pilotage à long terme de leur système de chauffage. Elles n’ont pas d’idée sur les travaux à long terme.  En raison de la hausse de l’immobilier cela n’impacte pas le prix de vente.

C’est un peu comme si les propriétaires ne se sentaient pas propriétaires de leur bien et de leurs données, comme le carnet d’entretien de la chaufferie qui n’est pas souvent regardé.

Il ne viendrait à l’idée de personne de conduire une voiture sans compteur de vitesse : c’est pourtant ce qui se passe en copropriété.

Comment se passe votre diagnostic ?

Nous proposons d’accompagner les copropriétés sur l’optimisation de leur système de chauffage d’abord, et plus globalement sur les dépenses énergétiques, en intégrant l’isolation et la ventilation.

Bien sûr, les copropriétés n’ont pas envie de payer et veulent d’abord réduire leurs charges en réduisant les gaspillages avant de d’investir.

Pour connaitre l’existant, il faut du temps. Or bien souvent, les syndics et le conseil syndical ne prennent pas le temps ne serait-ce que de mesurer, de contrôler ou de calculer les consommations.

Pour cela, nous récupérons les factures d’énergie et les plans du bâtiment et les historiques des interventions.

Il est important pour les copropriétés de garder un historique des pannes, des réparations et des consommations. Sans cela, il est difficile de piloter correctement l’installation.

Puis nous réalisons un bilan énergétique en termes de consommation et de coût.

Nous mettons les informations en ligne avec notre nouvel outil qui permet à la copropriété de suivre la consommation.

Comparaison des charges de l'immeuble avec les statistiques de l'ARC
Comparaison des charges de l'immeuble avec les statistiques de l'ARC
Consommation d'énergie pour le chauffage en proportion des températures constatées (DJU)
Consommation d'énergie pour le chauffage en proportion des températures constatées (DJU)


Courbes des températures (permettant les comparaisons des saisons de chauffages. Plus le trait est élevé plus il fait froid)
Courbes des températures (permettant les comparaisons des saisons de chauffages. Plus le trait est élevé plus il fait froid)

[ Attention offre spéciale aux lecteurs de VertDurable :
Le logiciel est en phase de béta tes et CoprO²
offre gratuitement le suivi aux premières copropriétés qui s’en montreraient intéressées. Adressez vous directement à P. Mercier pour les modalités. ]

Notre idée est de reproduire l’ordinateur de bord de la voiture pour que les propriétaires ne soient pas aveugles sur leur système de chauffage.

Nous avons également un planning des interventions où toutes les opérations prévues sont indiquées. Car bien souvent, si des interventions ne sont pas réalisées, qui s’en soucie ?

Les plans de la copropriété sont en ligne également, comme ça tout le monde en dispose, ce qui garantit qu’ils ne soient pas perdus par un copropriétaire ou par le syndic. Les copropriétaires n’imaginent pas le temps que les chauffagistes peuvent perdre à chercher ou passe les tuyaux ou a trouver à quoi correspond un tuyau. Cela se retrouve forcément dans la facture. De plus, l’absence de plan empêche toute intervention rapide en cas de fuite sur le réseau d’eau ou tout équilibrage du réseau de chauffage.

Nous ne proposons donc pas un outil d’information en temps réel, mais presque, qui permet aux petites copropriétés de disposer d’un outil de contrôle.

Nous ne demandons pas à la copropriété de s’équiper en compteur, nous nous adaptons à l’existant.

Cela fera économiser bien des coups de fils au syndic ou au président du conseil syndical.

 Est-ce la première étape avant une rénovation énergétique ?

Pour lancer une rénovation énergétique, il faut d’abord apprendre à maîtriser l’existant. C’est cette phase de maitrise qui va permettre d’appendre le management énergétique aux acteurs.

L’idée est d’enclencher une dynamique autour de la question du chauffage dans la résidence, d’obtenir les premiers résultats pour motiver les copropriétaires.

Car pour les copropriétaires bailleurs et ceux qui envisagent de revendre à moyen terme, l’intérêt économique est bien entendu de refuser tout investissement lourd et ce d’autant plus que les travaux d’économie d’énergie n’ont pas actuellement d’impact sur le marché de l’immobilier.

Par ailleurs nous avons souvent constaté à regret sur le terrain qu’en matière d’économie d’énergie les réponses sont toujours maximalistes. A savoir : ” si vous voulez faire des économies : remplacez votre chaufferie, installez des doubles vitrages partout, refaites votre toiture et une isolation par l’extérieur du bâtiment“. Certes, c’est la solution technique mais cela ne tient pas compte du contexte socio-économique des copropriétés. Dans cette réponse en tout ou rien, finalement il ne se passe rien. Mais 2020, c’est demain et il y a urgence économique et environnementale à faire des économies d’énergie dès aujourd’hui.

Proposez-vous des CPE (contrat de performances énergétique) ?

Actuellement, nous facturons au temps passé, mais nous avons des copropriétés en test pour lesquelles une partie de notre temps de travail est pris en charge par les économies réalisées.

L’objectif est d’avancer encore plus loin dans cette direction. C’est encore trop tôt pour faire une offre uniquement financée par les économies réalisées.

Nous remercions Philippe Mercier pour ses conseils.

Si vous voulez contacter CoprO² rendez vous sur leur site ou écrivez à info [arobas] copro2.com

Note déontologique

– Cet article fait partie d’une série d’interview de professionnels du bâtiments et d’énergies renouvelables.
– Le point de vue présenté ne reflète pas forcément celui de la rédaction de VertDurable.
– La présentation de la société n’a fait l’objet d’aucune rémunération.
– Les liens vers les sites des professionnels ne sont pas rémunérés ou payants.
– Nous réalisons le choix des photos.
– Si vous êtes un professionnel de la rénovation « durable » et « nouvelles » énergies votre témoignage nous intéresse, contactez nous.

 

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